Avais-je le choix ?

 

Écrivez un texte au thème libre et sous la forme de votre choix

qui finira par

« je n’avais pas d’autre choix »

 

 

-----------------------------------

 

 

 

Victoire ! Ma mère m’avait  enfin permis la veille de fréquenter la piscine municipale ! Elle avait dû juger qu’à quinze ans et quelques mois, avec l’âge légal du mariage était venu celui de l’immunité acquise face aux multiples germes pullulant dans les grands bassins.

Cette heureuse nouvelle intervenant peu de temps après ma première surprise-partie, j’augurais  de grandes joies de cet évènement, d’autant que Gérard, avec qui j’avais dansé quelques slows prometteurs la semaine précédente, serait de l’expédition. La dite expédition comportant toute la bande, soit une dizaine de garçons et filles adeptes de la « fureur de vivre » version française.

Sitôt prête, je fis deux longueurs de bassin dans un crawl impeccable, manière d’en jeter plein la vue à Gérard et d’évincer à coup sûr d’éventuelles rivales.

Quant aux garçons, eux ne tardèrent pas à se succéder sur le plongeoir du sept mètres, ravis de voir les nanas se pâmer d’admiration et d’effroi.

Hélas, Alice, ma plus sérieuse rivale devenue depuis peu ma pire ennemie- en réalité depuis la dernière boum justement, vue sa manière d’allumer MON Gérard- se mit à grimper à toute vitesse les marches très étroites menant au sommet du plongeoir. Trois fois hélas, une fois là-haut, elle se jeta dans le vide en un plongeon de grande classe et fendit l’eau sans une éclaboussure…

Je décidai aussitôt de surpasser son exploit. Mais une fois au sommet de ce satané plongeoir, découvrant avec inquiétude l’eau aux reflets miroitants dans un espace soudain rétréci, je fus prise  de vertige  ainsi que d’un irrésistible désir de faire demi-tour. Le maitre nageur, qui ne m’avait pas quittée des yeux lors de mon ascension, me rappela, à voix haute, que c’était formellement interdit. Alors, renonçant à la fois à Gérard et à toute dignité, dans un grand cri de terreur, je me laissai tomber comme une pierre en éclaboussant tous les spectateurs. Et non  je n’avais pas eu d’autre choix.

           El Pé

 

__________________________________

 

Image de Freepik

 

 

Mais que faire dans l'incertitude d'une journée pourtant bien commencée mais qui allait s'alourdissant au fil des heures jusqu'à devenir insoutenable ? Après une matinée très active et entièrement consacrée à de multiples obligations matérielles, après un repas rapide dans l'espoir d'un après-midi de quiétude et de liberté, voilà que l'intrusion d'une sonnerie téléphonique insistante mit un terme à toutes mes ambitions immatérielles et spirituelles. Quelques mots seulement et s'ensuivit une attente vertigineuse emplie de douloureuses et funestes pensées qui n'avaient de cesse de nourrir mon angoisse et mes sanglots aussi. Et le métronome des minutes semblait s'amuser à les allonger vers un terrible point d'orgue vraisemblablement inévitable...

 

          Je pris un livre déjà ouvert mais n'avais plus aucun souvenir des pages lues auparavant. Je le reposai donc et saisis ma plume afin de coucher sur une page toutes les réflexions et tous les sentiments qui assiégeaient mon esprit. Et mon âme en devenait plus fiévreuse, et mon cœur se faisait de plus en plus lourd au fil du temps qui paraissait s'éterniser et parfois même s'arrêter. Mais la main était incapable de guider mon écriture et de lui donner le relief de mes pensées profondes. Je quittai alors le bureau et me dirigeai vers la fenêtre pour essayer d'admirer la nature luxuriante et le bal des oiseaux. Et là aussi, un voile devant les yeux, rien ne parvenait à attirer et à retenir mon attention... Que faire dès lors pour supporter l'attente d'une nouvelle sonnerie avec la terrible appréhension de ses tristes nouvelles ? Je décidai enfin d'arpenter, d'un pas rapide, la maison tout entière et de fendre ainsi son silence assourdissant. Mais je me trouvai rapidement dans l'incapacité d'agir tant mes membres étaient tous devenus comme anesthésiés...

 

          Alors je me posai sur le rebord d'une chaise, prête à bondir, et laissai divaguer yeux et esprit dans le mutisme fragile de mon environnement : je n'avais pas d'autre choix...

Syrinx

_________________________________

 

 

 

Image de vecstock sur Freepik

 

 

Ça a commencé par un tout petit mensonge.

Un cours de danse que j’aurais dégoté dans un village voisin. Il avait la danse en horreur, il ne proposerait jamais de m’y accompagner. D’autant plus que le mardi passe à la télé une de ces séries dont il raffolait.

Bon, la danse, c’était vrai dans un sens. Ce beau garçon à l’air un peu voyou, je l’ai rencontré lors d’une soirée d’anniversaire d’une copine. Il m’avait invitée pour un rock. Puis un peu plus.

Un verre, un mardi soir, dans une guinguette au bord de la rivière.

De mardi soir en mardi soir, le verre s’est déplacé de la guinguette au salon du pseudo voyou.

Pseudo...Un petit air canaille qu’il affectait pour séduire les filles naïves…

Le menu des mardis soirs chez lui aussi a évolué. Un verre, dans le canapé, assis d’abord, puis dans diverses positions assez intéressantes. Au début.

Puis il s’est lâché. C’est devenu soirées pizzas, série télé…

Je me tapais trente bornes aller-retour pour faire exactement ce que j’aurais fait chez moi avec Jean-Luc.

Ma vie devenait un enfer de monotonie, j’allais m’éteindre lentement mais sûrement dans la platitude que m’offraient les deux hommes de ma vie.

Alors quand Jean-Luc a décidé de revendre la Porsche, j’ai inventé que l’ami d’un copain aimerait l’essayer. J’ai convaincu Cyril de venir faire un tour avec Jean-Luc, histoire de voir, au cas où il aurait été tenté par une jolie voiture d’occasion. Une affaire !

Ça m’a demandé un peu de recherches techniques, mais saboter des freins, c’est à la portée de tout le monde finalement.

La route raide qui dévale la colline droit vers la rivière a été idéale…

 Je n’avais pas d’autre choix.

Marie-Christine

_________________________

 

 

 

Image de Freepik

 

 

-- Je n’avais pas le choix, vois-tu, il fallait que je parte.

Elle se trouvait au bord du lit, sur lequel chaussettes et lingerie, lainages et robes de soirée, pantalons et pulls d’hiver s’entassaient pêle-mêle autour d’une valise béante.  Elle ne savait pas par quel bout en prendre le remplissage.

Sur la photo, Georges la regardait.  C’était une très grande photo qu’il avait fait faire chez un photographe très connu et très cher. La même photo, en format plus petit, se trouvait sur un meuble du salon.

-- Tu vois, je fais ma valise, je m’en vais, je te quitte.

Les sous-vêtements en premier, c’est cela.  Et puis les chaussures.  Bien emballées, les chaussures... Elle s‘assit sur le lit. Elle se sentait soudainement très fatiguée.  Elle avait envie de dormir…

Elle n’entendit pas la porte de l’entrée s’ouvrir.

-- Mais que fais-tu ? demanda Georges, sur le seuil de la chambre.

Elle sentit son ventre se contracter.  Un vent de panique la balaya.

Elle balbutia :

--J’essaie de voir si tout rentre bien dans ma valise pour quand nous irons voir ta mère à Nice, cet hiver.

-- Tu ferais mieux d’aller t’occuper du dîner.  Je vais prendre un whisky en attendant.

Elle le suivit et, dans le couloir, se surprit dans la glace. C’était ce même reflet qui tout à l’heure l’avait incitée à faire sa valise... Mais il faut bien trop de force pour résister, pour partir…

-- Je n’avais pas d’autre choix, répondit-elle à l’air vaincu, craintif et plein de déception d’elle-même qui lui faisait face.

Suzanna

______________________________________

 

 

Image de Freepik

 

 

Sauvés !

Je suis là, heureuse, bien au chaud dans le pays qui m’a accueillie, mais cela n’a pas toujours été le cas.

Là où je vivais, nous étions beaucoup à errer dans les rues, sans  toit pour nous abriter, souvent le ventre vide, infestés de parasites, porteurs de blessures qui avaient bien des difficultés à cicatriser. On nous chassait avec une terrible cruauté, alors nous vivions sans foi ni loi et seuls les plus débrouillards s’en sortaient.

Chaque jour, ma principale obsession était de nourrir mes petits. Ils avaient faim, je n’avais presque plus de lait et ils avaient besoin de nourriture plus solide à leur âge. Moi aussi, d’ailleurs pour pouvoir m’occuper d’eux. Il fallait que je sorte de notre abri de fortune pour trouver une poubelle bien garnie ou pour voler si l’occasion se présentait. Mais sortir, c’était s’exposer à ne pas revenir, à se faire prendre par les dogcatchers qui veillaient, traquaient, étranglaient avec leur crosse et trainaient vers leur camion le malheureux qui se faisait prendre, pour le jeter dans une fourrière repoussante, derrière des grilles qui ne se rouvraient jamais. Et qui prendrait soin de mes petits si je n’étais plus là !

Je sortis quand même ce jour-là, animée par la nécessité de nourrir ma portée. Le plus silencieusement possible, à pas de loup, me glissant le long des murs, je parvins à trouver un gros morceau de viande, mais au retour, presqu’en arrivant à l’abri de fortune qui nous hébergeait, je m’encastrai dans une crosse. Je crus mon cou brisé tellement la douleur était insupportable et je me sentis trainée sur le dos sans pouvoir m’échapper. Je ne dus mon salut qu’à la chute providentielle de mon agresseur, déstabilisé par un gros trou sur la chaussée. J’en profitai pour m’enfuir, meurtrie, le cou et le dos en sang, mais ma mâchoire toujours crispée su ma précieuse nourriture. Exténuée, je m’allongeai et avec émotion, je regardai manger mes petits. Ils ne mourraient pas de faim ce soir.

Des jours passèrent, tous identiques, jusqu’à ce matin où nous fûmes découverts, soignés et sauvés par une association, puis adoptés en France par une famille qui nous apporte, à chaque instant, beaucoup d’amour.

Maintenant, sur mon coussin douillet, je n’ai pas oublié ces moments où j’ai mis ma vie en grand danger, mais je me dis que si je voulais accomplir mon devoir de mère, je n’avais pas d’autre choix.

Gill

 

___________________________