Quel voleur maladroit!

 

Imaginez cette scène

 

« Un voleur s’est introduit dans une banque pour y faire un hold-up. Sous la menace de son arme il s’est fait remettre le contenu de la caisse. En s’enfuyant, il s’est pris le pied dans son lacet, a chuté et en voulant se rattraper, s’est tiré une balle dans le pied. La police et le SAMU sont arrivés. »

 

Tirez au sort un personnage

Puis racontez la scène par sa bouche

 

Le voleur      le policier     le caissier     l’agent de sécurité   

le chien de l’agent de sécurité     le médecin du SAMU

un client     une cliente

 

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Récit d’une cliente

 

 

 

 

Et si… ?.

 

On ne peut pas vraiment dire qu’il s’agisse d’un don.  Et même, dans les premiers temps, j’ai pensé à une calamité.  Cela a commencé quand j’avais dix ans. Ce que j’imagine arrive. Il suffit que je pense « Et si... » pour que l’événement se produise. Ma sœur avait grimpé dans le cerisier du jardin. Un moment donné, j’ai pensé « Et si elle tombait de l’arbre ? , une pensée induite uniquement par la peur bien évidemment.  Ma sœur tomba aussitôt, une chute sans gravité, mais je me sentis terriblement coupable. Ce n’était peut-être qu’une coïncidence ?  Seulement, par la suite, il suffisait que je commence une pensée par « Et si... » pour que l ‘événement se produise.  Je m ‘amusai d’abord à prophétiser plusieurs petits événements mineurs (ma mère mettant du sel dans une pâtisserie au lieu de sucre, mon père oubliant sa serviette dans un café, mon frère donnant rendez-vous le même jour au même endroit, à la même heure à deux amoureuses à la fois…) Puis je provoquai des choses moins anodines, surtout au détriment de professeurs dont les réprimandes me furent odieuses, jusqu’au jour où un ouvrier me siffla depuis un échafaudage. Il se cassa la jambe et de ce jour-là (je devais bien avoir 16 ans), j’arrêtai ces expériences douteuses.

J’avais 21 ans quand j’entrai dans une banque pour  la première fois. Je venais ouvrir un compte pour y déposer mon premier salaire.

Un employé me fit asseoir dans un une partie de la salle agencée de façon à recevoir confortablement et discrètement la clientèle. Puis il remonta dans les étages et j’attendis patiemment que l’on s’occupe de moi. À cette heure de la journée, il n’y avait qu’un seul guichet ouvert. L’unique autre client papotait avec le caissier.  Or j’avais vu en arrivant, le gardien promener son chien. Ce qui m’a fait penser malgré moi : « Et s’il y avait un hold up ? » Dans la circonstance présente mon bizarre petit « talent » tenait aussi de la prémonition car la porte s’ouvrit et un homme affublé d’un masque de clown se rua dans la place.  Il brandissait un revolver et menaça de buter le premier qui bougerait le coin d’une oreille. « Jette ton portable à terre, loin de toi, me cria-t-il. » J’obtempérai.

Il bouscula le client tétanisé, lança un sac vide au caissier et lui ordonna d’y vider le contenu de sa caisse ainsi que celui des trois autres caisses momentanément fermées. La chose prit moins de deux minutes pour être exécutée.  Il se précipitait déjà vers la sortie avec son butin quand finalement je sortis de mon état de sidération.

« Et s’il se prenait le pied dans son lacet et se tirait une balle dans le pied en tombant ? », pensai-je...

 

Suzanna

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Récit du médecin du SAMU

 

 

 

J'entends la sonnerie, c'est bon je devine que je dois me préparer, ne rien oublier.

Je laisse Yvan prendre les informations sur l'accident, le lieu etc...
J'aurais bien soufflé encore un peu sur mon café brulant, attrapé au vol quelques rires ou paroles de mes collègues; Non aujourd'hui je pressens une intervention particulière. La sirène emplit l'espace, les rues défilent dans un souffle haletant, la voiture avale le goudron, Yvan conduit avec concentration tout en légèreté...On arrive sur le lieu, les gyrophares balaient l'air, on pourrait se noyer dans tout ce Bleu virevoltant.

La poignée de ma sacoche rivée à ma main, j'avance, les gens s'écartent, je ne vois plus que l'homme allongé sur le sol, je devine la blessure, son pied ensanglanté  laisse mourir un filet de sang sur le trottoir, je cherche son regard, pose une main à la base de son cou écoute son pouls, ses lèvres tremblent, peut-être de douleur ou d'une crainte autre venue du fond de son être.....Le désespoir…...
Une piqure, je la prépare avec des gestes rapides, habitué que je suis à ces moments- là. L'antalgique calme mon blessé, il m'appartient un instant, le temps d'apporter les 1ers soins. Je lui parle avec calme, j'essaie de poser un regard bienveillant, il a l'air si jeune, perdu, effrayé, je sens sa main s'ouvrir et se refermer sur mon bras, ses yeux accueillent les miens,  je le rassure, il n'y a rien de grave, le SAMU va le prendre en charge, il sera soigné à l’hôpital.

J’attends le brancard, le brouhaha autour de nous se fait plus intense, palpable. Je ne lâche pas son regard, je frémis à ses larmes qui perlent sur le bord de son visage. J'ai besoin de lui parler, le réconforter, apaiser sa terreur, être à terre, ne plus se lever, ne plus bouger, prisonnier de sa maladresse. Mes mots l'aident, je le vois...Encore une parole « Tu verras, la vie peut être surprenante, ne te décourage pas, pardonne-toi ! Pour grandir »

Le brancard l'emporte...La sirène retentit... Je reste un moment le regard perdu au delà de la fuite de l'ambulance.

Roselyne

 

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Récit de l’agent de sécurité

 

Image de Freepik

 

 

Un aboiement furieux, suivi d'un coup de feu, se firent entendre à l'intérieur de la Société Générale. Alphonse, l'agent de sécurité, arriva à toute vitesse, précédé de Rex, le Malinois dressé, qui de tout son poids maintenait déjà ce gangster, peu scrupuleux mais pas trop agile: dans sa précipitation, oubliant certainement de nouer ses lacets, il chuta brutalement, se tira une balle dans le pied. Face contre terre et le pied en sang, il gisait là, minable, ses yeux bleus vifs implorant la pitié.  La caissière, terrorisée, lui avait docilement rempli de billets un sac de jute, sous la menace d'une arme, gros calibre, peut- être aussi autre chose ressemblant à une grenade.  Le sac, sous l'impacte de la chute, s'éventra, les billets volant un peu partout.  La sonnerie d'alarme se tût enfin,  un policier se dirigea vers Alphonse et lui demanda de relater les faits.

« Je me trouvais à côté de la machine à café, lorsque un "brouhaha"  alerta Rex qui me tira avec force en direction de l'entrée. Ce que je vis M. Le Policier, me glaça le sang ! : Mimi, notre caissière, les mains en l'air, devant cet individu masqué la maintenant en joue, qui lui jeta un sac de jute pardessus la vitre, lui hurla :" vite, fais vite, si tu tiens à la vie ! Je veux tout ce qu'il y a et.. pas de Police ! »  Mimi s’exécuta, mais je remarquai qu'une main prit le sac, l'autre baissée actionnant notre  "Bouton Rouge " sauveur. Les quelques clients eurent le temps de se ruer vers l'extérieur.  Reste M. Henry notre Directeur, il doit être  toujours dans les toilettes. Au premier coup de feu, il est passé devant moi, en me faisant un clin  d’œil, puis a disparu. 

Monsieur Le Policier, heureusement que  Rex  mon bon chien a maintenu cet individu, vous n'avez plus qu'à le menotter, il n'a pas l'air très dangereux, c'est plutôt un " Parfait Nigaud ".

 

Christine

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Récit du chien de l’agent de sécurité

 

 

 

   Ouaf ! Ouaf ! Quel cirque ! Quel désordre ! Quel vacarme ! Ouaf ! Oh vous savez, je peux faire plus de bruit que vous quand je veux ! Ah mon maitre me fait signe de faire silence. Il a raison. Mais toi, Ô Maitre que j’aime et vénère, ne peux tu pas les faire taire ? On ne s’entend plus ici, à commencer par l’homme allongé par terre. Que me dis-tu, Ô Maitre ?  Que j’ai le devoir de le garder ? Bien sûr. Mais pourquoi faire ? De la façon dont il s’est arrangé, il ne peut pas aller bien loin…Mais suis-je distrait ! Mon maitre me demande de bien veiller sur ce pauvre homme, évidemment ! Je dis pauvre mais je devrais plutôt dire bêta. On n’a pas idée, aussi, de se suicider au beau milieu d’une banque, surtout en visant si bas ! Il devait être complètement bouleversé, ce p’tit gars. Ouaf ! Oui, je comprends, mon brave, je comprends. Vous avez mal, mais les secours ne vont pas tarder à arriver. J’ai l’habitude des accidents. Ouaf ! Comment ? Oh mais j’ai compris, vous savez, même si je ne regardais pas par là.. Vous n’avez pas supporté quand le caissier vous a brutalement annoncé votre découvert. Il n’en fait pas d’autres, cet Albert. C’est un méchant homme, au regard mauvais, jamais un mot gentil, jamais une caresse. Je ne peux pas le sentir. Mais lui ne perd rien pour attendre. Ouaf ! Oui, je sais vous avez mal, mon pauvre mais ce n’est pas une raison pour crier comme ça hein ! Pouah, vous saignez ! J’ai horreur du sang ! Presqu’autant que des armes à feu. Tiens justement : j’entends arriver l’ambulance, en même temps que la Police. Ah ! Ils ont fait vite ces chics types ! Et je ne dis pas ça parce que je suis policier comme eux. Ouaf, Ouaf ! Ici Messieurs, la victime est ici ! Ouaf ! Ouaf ! Ouaf ! Je cours saisir Albert par le bas de son pantalon pour ne pas qu’il s’échappe…et je vais y mettre un peu les dents, pour lui apprendre. Ici Messieurs, le coupable est ici. Tout est de sa faute, il faut le jeter en prison. Comment ? Que je le lâche.  Tout de suite. Qu’il est gentil cet agent. Il sait parler aux chiens. Que dît-il ? Comment je m’appelle ? Rantanplan. Pourquoi ?

  El Pé

 

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Récit du caissier

 

 

 

- Hé bien, monsieur l’inspecteur, je me suis douté de quelque chose dès qu’il est entré. Un peu nerveux. Quelque chose dans sa manière de glisser un œil vers ma caisse tout en ayant  l’air de se diriger vers le guichet des dépôts. J’ai noté tout un tas de détails qui pourront vous aider à tracer un portrait robot. Inutile ? Puisque vous l’avez déjà ligoté sur son lit d’hôpital ! Ah, c’est dommage ! C’est vraiment dommage. Pour une fois que je pouvais aider une enquête grâce à mes talents d’observateur…

 Pourquoi n’est-il pas venu directement vers moi ? Je n’en sais rien. Enfin, vu que ma collègue terminait une opération et ne le regardait pas, il a dû profiter de ce petit détour pour sortir son arme. Tout à coup il l’avait en main. Il a crié « Tout le monde à terre, les mains sur la tête, c’est un hold-up ! ». Ce que nous avions déjà compris, pour le hold-up. Il est venu vers mon comptoir et m’a dit « Toi, le caissier, relève-toi et mets le contenu de la caisse dans ce sac. » Je ne savais pas s’il voulait aussi la monnaie. C’est idiot, réflexe de caissier. Alors je lui ai demandé « vous voulez aussi les pièces ? ». Il a répondu « donne tout », et je me suis senti humilié parce qu’il me tutoyait et je lui avais dit « vous ».

J’ai ouvert les trois compartiments accessibles et j’ai rempli son vieux sac.

Du coin de l’œil, j’ai vu le directeur, allongé, qui tentait de ramper jusqu’au bouton de sécurité. Je lui ai fait un signe des yeux. « Surtout pas ! Ne bougez pas ! ». Je lui ai probablement sauvé la vie, au directeur.

Pardon, monsieur l’inspecteur ? Si j’ai remis la totalité de la caisse ? Bien sûr que non. Deux fois par jour, je transfère le plus gros des dépôts dans un coffre, dans une arrière salle. J’ai sauvé la banque en quelque sorte…

Comment ça , vous avez récupéré tout ce qu’il a volé de toute façon !!

Bien la peine d’être le plus malin des caissiers !!!

 

Marie-Christine

 

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Récit d’une cliente

 

La première pensée qui me vient à l’esprit en me réveillant est « mais qu’est-ce que je fais assise par terre contre le mur ? »

J’ai très mal au dos, un homme me tapote la joue et je sens contre l’autre le souffle chaud d’une truffe humide, celle d’un beau Malinois, le binôme formé par l’agent de sécurité et son chien. Mon cerveau embrumé a du mal à remettre en ordre le puzzle de mes idées. Et tout à coup, je me souviens : ce matin, je devais déposer plusieurs chèques reçus hier dans ma galerie d’art et pour ne pas confier ces grosses sommes à l’appareil de remise automatique, je suis entrée dans la banque. Il n’y avait que trois clients, l’agent de sécurité et son chien, et derrière le seul guichet ouvert à cette heure matinale, le caissier. Cela devait être rapide.

 Je commence donc à remplir le bordereau de remise de chèque. Brusquement un homme entre. Très jeune, une vingtaine d’années, l’air un peu gauche, un peu inquiet, regardant tout autour de lui. Un client est au guichet, il se place derrière lui et attend. Quand arrive son tour, il sort maladroitement de sa poche visiblement trop étroite pour son contenu, un pistolet, en menace le caissier, et sans aucun autre effort, se fait remettre le contenu de la caisse qu’il introduit en vrac, avec difficulté, dans un sac lui-même un peu petit. Plutôt qu’un sentiment de peur, toute cette scène déclenche en moi une envie de sourire, tant ce voleur me semble imprévoyant, mal organisé et peu dangereux. J’attends plutôt que le «holdup» se termine. D’ailleurs, personne ne semble vraiment inquiet, même le chien n’a pas l’air de  vouloir intervenir.

C’est à ce moment que le voleur fait volte- face pour s’enfuir, que ses pieds semblent s’emmêler dans je ne sais quoi et que je le vois basculer en avant, tout en entendant le coup de feu, ce qui me fait reculer et ressentir immédiatement un vive douleur dans le dos, me donnant l’impression d’être touchée et proche d’une mort imminente. Et à partir de là, c’est le trou noir…jusqu’à maintenant ! Je constate que je n’ai nulle blessure, que je suis assise par terre dans la banque et que devant moi, le voleur gît et gémit sur le sol, le pied en sang, entouré d’un homme en blanc qui le soigne et d’un homme en bleu qui le questionne.

Et l’agent de sécurité me donne le maillon manquant de l’histoire : en reculant au moment du tir, je me suis cognée violemment contre le coin de la tablette où j’avais rempli mon bordereau, et terrorisée par l’idée d’avoir reçue une balle, je me suis évanouie. Quant au voleur, c’est lui qui a reçu cette balle dans le pied : il a chuté après s’être emmêlé les pieds dans ses lacets défaits et en voulant se rattraper, il a appuyé malencontreusement sur la détente de son pistolet. Le SAMU puis la police sont arrivés et je me suis réveillée.

Remise de mes émotions, et bien vivante, je vois le gendarme s’approcher de moi et je me prépare à relater de nouveau tout l’histoire, telle que je l’ai vécue.

Gill

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