Trois objets font l'histoire

 

Chacun écrit deux noms d’objet sur des papiers pour faire une pioche

 

On tire au sort trois noms d’objet

 

Ecrire un texte mettant en scène ces trois objets

 

 

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Alors te revoilà. Je ne pensais plus à toi depuis longtemps. Et tout ce temps tu te tenais là, dans l’émerveillement de ton âge devant la magie des veilles de Noël, entre quoi ?… tes quatre à neuf ans…

 Dès le matin, tu t’activais avec ta mémé dans la cuisine. Tu appuyais de toutes tes forces sur les pâtons sucrés, avec le rouleau de pâtisserie. La pâte s’aplatissait un peu plus à chaque aller-retour. Puis tu lui appliquais de petits moules métalliques, demi-lunes ou étoiles, pour découper les biscuits qui doreraient bientôt dans le four.

L’approche du soir t’emplissait de joie et d’impatience. C’est toi qui allumait une à une les chandelles colorées qui garnissaient les bougeoirs disposés sur le buffet, sur la cheminée, sur la table.

A la lueur dansante des flammes, les trompettes des angelots suspendus au sapin scintillaient comme de l’or.

 Un Noël, tu n’as plus allumé les bougies, les anges se sont tus et c’est ton frère qui maniait le rouleau de pâtisserie de mémé.

 Mais toi, celle qui vivait avant d’avoir grandi, toi tu es restée, bien plus qu’un simple souvenir, puisque là, devant ces objets devenus insignifiants, je te sens encore en moi, vibrer de la douce plénitude de ces journées où rien de mal ne pouvait arriver.

 

Marie-Christine

 

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Le jour des gâteaux

 

Quand, le dimanche, ma grand-mère prenait dans le tiroir de la cuisine, son rouleau à pâtisserie, je croyais déjà sentir l’odeur des gâteaux juste sortis du four.

Alors mon grand-père sortait sur le balcon jouer de la trompette. Toute la rue savait qu’il y aurait des gâteaux à la maison et que ceux qui viendraient prendre une tasse de café chez nous en auraient une part. Mes grands-parents aimaient la compagnie.  Ils disaient que vieillir n’est rien si l’on ne reste pas tout seul.  La solitude à deux, ce n’était pas du tout leur truc...

Mais dimanche passé, il y eut une panne d’électricité.

-- Marc, prend la lampe de poche et apporte-moi les bougeoirs de la chambre,  sur ces bouteilles,  les bougies ne tiennent pas bien.

Il n’y eut pas d’annonce claironnante.

La cuisinière fonctionnant au gaz, nous eûmes droit à du gâteau quand même.  Il y en eu beaucoup trop pour nous trois seulement et nous nous sentions tout bêtes ainsi, tout seuls et tout penauds devant les tartes trop grandes.

-- Tu aurais dû jouer de la trompette quand même, dit ma grand-mère.

 

Suzanna

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Dans la maison de campagne de notre vieille tante, depuis deux jours il m'était impossible de dormir. Dans le grenier, un bruit continu se déclenchait, du clocher du village, juste après les douze coups de minuit.

Brûlant de curiosité, ce soir je décidai de monter l'escalier vermoulu en direction des combles. Avec un effort considérable, je soulevai la trappe, passai la tête. Dans le fond, quelle ne fut pas ma surprise de trouver le bougeoir de cuivre, curieusement astiqué et une magnifique chandelle qui suite à un appel d'air s'éteignit, me laissant dans l'obscurité la plus totale.

Je glissai sur un rouleau à pâtisserie, probablement balancé du haut de l'escalier, pour s'en débarrasser, car personne ne cuisinait. Je basculai, ma  tête heurta la vieille trompette de mon grand -oncle, un des meilleurs joueurs à la fanfare locale, en son temps.

Plus bas je ratai une marche de l'escalier, d'où je fis une chute, m'affalai inerte sur le carrelage humide.

Soudain une lueur vint à ma rencontre, me serra les mains, murmura près de mon visage :

" Bienvenue dans le monde des lucioles Marie, on t'attendait .. " Je me mis à la suivre, je flottais, mes pieds ne touchaient pas le sol.  Tout était gris, j'évoluais le long de ce qui semblait être un tunnel, tout au fond une ouverture et une lumière jaune vif, incroyablement aveuglante, plus je m'en approchais et plus je perdais le sens d'apesanteur.

Une odeur âcre me parvint, j'ouvris les yeux, je me trouvais allongée sur le carrelage, ma mère penchée au dessus de moi, me secouait, Cachou léchait copieusement mon visage.

Je réalisai que peut-être je venais de faire, ce que l'on nomme  " expérience de mort imminente ".

 

Christine

 

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Auguste Renoir, Public domain, via Wikimedia Commons

 

 

Secret de famille

 

Chaque fois que je vais dans la maison de ma grand-mère, je monte dans le grenier. J’aime me retrouver dans cette atmosphère surannée et familière qui me fait rêver. J’y retrouve maintes histoires de famille autour desquelles j’aime imaginer, broder. Ça et là, des objets m’interpellent, comme cette pendule en bois incrustée de nacre qui ne rythme plus le temps ou ce porte-plume ancien, au manche d’ivoire, chef d’œuvre d’un artisan inconnu. Je les ai trouvés par hasard, dans une grande malle où ils voisinaient avec un chapeau haut de forme de mon grand-père et un biberon de la marque « madame Breton », l’une des premières productions à grande échelle, gardé pour je ne sais quelle raison.

Cette pendule et ce porte-plume sont liés à l’histoire d’une de mes grands-tantes, celle dont on ne parle pas. Et ce que je sais, je l’ai reconstitué après maintes questions à ma mère, réflexions et déductions personnelles.

Ma grand-tante s’appelait Camille, était très belle et très amoureuse du fils du châtelain du village. On les voyait souvent se promener au bord de la rivière ou dans les bois. Ses cheveux bruns contrastaient avec le blanc immaculé de sa petite coiffe, son châle de dentelle recouvrait élégamment ses frêles épaules et un ruban de satin bleu marquait sa taille fine. Elle était gaie, toujours souriante, persuadée d’être bientôt l’épouse du futur châtelain.

Puis un jour, sa gaité s’est envolée, on l’a vue le plus souvent se promener seule sur les bords de la rivière, le regard vague et triste, les yeux rougis. J’ai même cru comprendre que certains avaient dit, à demi-mots, que sa taille s’épaississait sous le ruban bleu. Puis un jour, on ne l’a plus vue. On l’a cherchée sans la trouver. Dans la rivière, on a vu flotter une petite coiffe et un fichu de dentelle. Sur la cheminée du salon, on a trouvé, sous la pendule qui rythmait le temps, à côté du porte-plume au manche d’ivoire, une lettre où était écrit « Adieu, je vous aime ». Depuis plus personne n’a parlé de Camille.

Moi, je pense souvent à elle qui est entourée de mystère. Que s’est-il passé exactement, Je ne peux que le supposer et cela alimente ma rêverie.

Gill

 

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